Madame/Monsieur la/le Président-e,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,
Face à la pauvreté, face à la précarité, face à l’exclusion d’une partie grandissante de la jeunesse : il y a urgence.
Entre 2002 et 2018, le taux de pauvreté des jeunes est passé de 8% à 13%.
Pour les personnes seules – qui ne vivent pas chez leurs parents et ne sont pas en couple – le chiffre augmente encore, avec 22% de jeunes sous le seuil de pauvreté.
Ces chiffres de 2018 sont les derniers communiqués par l’observatoire des inégalités, mais la crise sanitaire a aggravé la situation des jeunes précaires.
Toutes les organisations que nous avons auditionnées au niveau national ou dans les territoires nous disent la même chose : la jeunesse de ce pays a été percutée par la crise.
L’incertitude qui pèse sur son avenir et l’impossibilité de trouver rapidement du travail plongent toute une génération dans l’impasse sans aucun filet de sécurité. Le recours à l’aide alimentaire d’urgence explose et la détresse psychologique prend des proportions dramatiques.
La voilà l’urgence, la voilà la conséquence de la crise. La jeunesse est au bord de la rupture et il est temps d’agir.
La France, qui peut être fière de son modèle social, en a exclu en partie sa jeunesse. C’est une anomalie européenne : chez quasiment tous nos voisins, les droits sociaux s’ouvrent pleinement avec la majorité.
Face à cette situation, le gouvernement a multiplié des dispositifs dont la garantie jeune. Il est ainsi prévu son extension à 200 000 bénéficiaires en 2021.
En quoi consiste-t-elle ? En une aide financière et un dispositif d’accompagnement temporaire – un an et demi au maximum – pour permettre l’accès à l’emploi et à une formation.
Voilà la seule réponse que l’on apporte à une jeunesse qui menace de tomber massivement dans la pauvreté : une aide temporaire et des rendez-vous dans les missions locales.
Pourquoi ce choix ? Alors que l’on dispose déjà d’un dispositif simple, le RSA, – qui n’est certes pas parfait, mais dont toute la mécanique administrative est en place – on préfère multiplier d’autres dispositifs avec un seul but : décourager les potentiels bénéficiaires.
Celles et ceux qui n’ont d’ordinaire que la “simplification de l’état » à la bouche lorsqu’il s’agit de détruire notre modèle social, rechignent aujourd’hui à une simple mise à jour du RSA.
Les raisons nous les connaissons : dogmatisme liberal et mépris pour la jeunesse
Monsieur Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, l’a affirmé sans détour sur BFM vendredi dernier « A 18 ans, ce qu’on veut, c’est un travail. On veut une rémunération de son travail, on ne veut pas une allocation ».
Monsieur le ministre va sûrement expliquer aux jeunes comment trouver un travail alors que le taux de chômage a littéralement explosé au 3e trimestre 2020 en passant à 22% chez les jeunes et alors que les organismes de statistiques s’attendent à une vague sans précédent de défaillances d’entreprises pour 2021.
Il est donc urgent d’agir, d’investir dans la jeunesse. Le Gouvernement a fait preuve d’une impressionnante célérité pour soutenir nos industries polluantes dans la crise.
Il est aujourd’hui temps de mettre la même volonté, la même conviction pour sauver notre jeunesse.
La proposition de nos collègues socialistes est simple, elle tient en une phrase : étendre le RSA aux jeunes de 18 à 25 ans.
Permettre aux jeunes qui ne suivent pas d’études ou de formation et qui n’ont pas de travail de disposer d’un minimum de ressources et d’un minimum d’autonomie.
La croyance selon laquelle une allocation encouragerait l’oisiveté et la paresse a été battue en brèche par toutes les dernières recherches académiques.
Je pense notamment aux travaux d’Esther Duflo – prix Nobel d’économie – qui a démontré que plus on aide les gens, plus ils sont capables de repartir d’eux-mêmes et plus ils sont aptes à sortir de la trappe à pauvreté dans laquelle ils étaient enfermés.
Les jeunes ont donc besoin de tout sauf du paternalisme d’une génération d’hommes d’état qui n’a jamais poussé les portes d’un CROUS ou d’une agence Pôle emploi.
Monsieur le ministre, Entendez l’appel de toutes les associations de jeunesse, de toutes les associations de lutte contre la pauvreté, de tous les collectifs d’aide aux précaires qui demandent l’extension du RSA aux 18-25 ans. Entendez l’appel du Conseil Economique Social et Environnemental qui, le 2 décembre 2020, a demandé solennellement l’extension du RSA aux 18-25 ans.
Chers collègues, Entendez l’appel d’Aurélien Pradié, secrétaire général des Républicains qui, lors d’un débat à l’Assemblée le 12 janvier, déclare que « les fous sont ceux qui n’osent plus se poser les vraies questions : la question des jeunes qui, de 18 à 25 ans, ne bénéficient d’aucun dispositif universel ».
Nous ne sommes pas ici dans un débat idéologique ou partisan.
Nous sommes en train de statuer sur une question de dignité et de lutte contre la pauvreté.
La présente loi propose un dispositif simple, concret, qui s’appuie sur l’existant.
Tout est déjà en place. Les départements sont en mesure d’effectuer ces versements, dès demain – à condition de les accompagner financièrement.
Alors que vos politiques économiques et sociales hypothèquent l’avenir de toute une génération, ayez la décence d’investir d’urgence sur leur présent, quoi qu’il en coûte.
Il est urgent de faire sortir les jeunes des mesures d’exception pour les faire entrer dans l’universel, comme tous les autres citoyens.
Le groupe Ecologiste – Solidarité et Territoires votera pour cette proposition de loi.