Le fonctionnement des universités en temps Covid et le malaise étudiant

Madame/Monsieur la/le Président-e, Madame la Ministre, Mes chers collègues,

Ma collègue Monique de Marco vous a présenté, dans sa globalité, l’analyse et le regard que les écologistes portent sur la crise majeure qui bouleverse le monde étudiant de notre pays.

Je voudrais m’attarder sur un point en particulier qui me semble essentiel : la santé mentale des étudiants. La détresse psychologique des étudiants a été une dimension sous-estimée de la crise que traverse la jeunesse. Les tentatives de suicide récentes ont jeté une lumière crue sur la détresse qui frappe de nombreux étudiants et étudiantes. On le sait, la série de restrictions que nous impose la crise sanitaire frappe durement la jeunesse :

  • Absence de vie sociale 
  • Arrêt des cours en présentiel 
  • Cantonnement des étudiants dans leurs logements parfois vétustes
  • Impossibilité de mener d’autres activités ou de travailler 

Autant de difficultés qui viennent sérieusement exacerber les problématiques de santé mentale. Mais tout mettre sur le dos du Covid serait se voiler la face. Nous sommes en fait devant une réalité qui dure depuis des années déjà.

  • La réalité d’universités publiques qui manquent tellement de moyens et de personnel que parler de délabrement n’est plus qu’un euphémisme. 
  • La réalité d’une jeunesse qui compte plus d’un million de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. 
  • La réalité d’une génération entière qui voit ses perspectives disparaître à l’ombre des crises économiques, sociales et – bien sûr – climatiques.

Il nous faut répondre à toutes ces réalités – aujourd’hui – mais aussi sur le long-terme. Avec des solutions matérielles tout d’abord, à fournir d’urgence aux étudiants : en revalorisant les bourses et en engageant la création d’une allocation minimale étudiante. Avec une réflexion sur la présence des étudiants en cours ensuite. Il y a un an, il était tout à fait nécessaire de prendre des règles de confinement d’urgence. Tous les campus ont fermé comme le reste du pays.

Un an plus tard, il est temps de travailler à des protocoles sanitaires de crise adaptés. Des protocoles pensés en fonction des campus et de leurs capacités et non plus décidés uniformément pour toute la France. Des protocoles qui doivent permettre le retour d’étudiantes et étudiants en présentiel, même partiellement.

Trouvons enfin des solutions, maintenant, à celles et ceux qui sont en détresse psychique, celles et ceux qui ne peuvent plus continuer leur vie comme avant. Les conséquences du 100% distanciel sur l’état psychologique des étudiants a été largement sous-estimé. Il faut de l’accompagnement, humain.

Dans ce domaine, la France est en queue de classement par rapport aux autres pays développés et de très loin. A la fin de l’année dernière, notre pays comptait 1 psychologue universitaire pour 30 000 étudiants. Pour information, en Autriche, c’est 1 pour 7300, en Australie, 1 pour 4000, en Irlande, 1 pour 2600 et au Etats-Unis, 1 pour 1600. La Charte de l’Accréditation Internationale des Services de Santé Mentale Universitaire recommande de viser un taux d’1 pour 1000 à 1500 étudiants. 

Si aucun pays n’atteint à ce jour ce chiffre ambitieux, force est de constater que la France en est loin, très loin. En janvier de cette année, le gouvernement a annoncé vouloir doubler ce chiffre, en recrutant 80 psychologues universitaires, ce qui porterait le ratio à 1 pour 15 000. L’effort doit être salué, bien sûr, mais comme de nombreuses réformes initiées par ce gouvernement en direction de la jeunesse, nous avons un souci d’échelle.

Ainsi, la création d’un “chèque psy” par le gouvernement s’inscrit dans cette même démarche. Ce chèque – qui porte mal son nom, puisqu’il s’agit en réalité de séances gratuites – permettra aux étudiants de bénéficier de 3 rendez-vous chez le psy. Mais comment satisfaire cet objectif louable alors que notre pays est si dramatiquement sous-doté en termes de personnel qualifié ? Afin de commencer à avoir un accompagnement correct dans tous les services universitaires, il nous faudrait atteindre 1 psy pour 4000 étudiants. Cela signifie le recrutement de 520 psychologues. Nous en sommes loin.

Il ne s’agit pas ici d’appeler à une dépense inconsidérée, à un caprice électoraliste. Il s’agit au contraire de répondre à une urgence, réelle et terrifiante : celle des files d’attentes qui s’allongent devant les bureaux des psychologues universitaires. Celle des 22% d’étudiants qui ont eu des pensées suicidaires dans notre pays. Il s’agit d’un investissement d’urgence dans l’avenir de notre jeunesse.

Madame la Ministre, la jeunesse de notre pays est au bord du gouffre. Cessez la politique des petits pas, des aides ponctuelles, insuffisantes, trop ciblées. Engagez, dès maintenant, un plan massif de l’Etat pour aider toute une génération à maintenir la tête hors de l’eau. 

Investissez :

  • dans les campus afin de permettre le retour en présentiel !
  • dans les aides matérielles et financières indispensables à la poursuite des études
  • dans la création de postes de psychologues 

Regardez enfin la jeunesse en face, 

Permettez-lui d’envisager son avenir avec espoir.

Je vous remercie.

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