Madame/Monsieur le/la Président-e,
Monsieur le rapporteur,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,
Chaque année 700 000 élèves sont victimes de harcèlement scolaire.
10% des élèves y font face au moins une fois dans leur scolarité.
Le harcèlement scolaire est un fléau pour notre pays.
Des cours d’école, aux réseaux sociaux, jusque dans les jeux vidéos, les victimes n’ont aucun répit.
Avec parfois des conséquences terribles et définitives.
Ces drames nous obligent.
Et nous devons leur apporter une réponse.
C’est l’objet de cette proposition de loi.
Fruit des travaux d’Erwan Balanant à l’Assemblée nationale, ce texte fait le choix tout d’abord de la reconnaissance d’un nouveau droit, d’un nouveau principe essentiel : celui d’une scolarité sans harcèlement.
Pour faire respecter ce principe, il est créé un nouveau délit, celui de harcèlement scolaire, assorti d’un panel de sanctions très élevées : entre 3 et 10 ans d’emprisonnement et 45 à 150 000 € d’amende selon la gravité.
C’est sur ce point en particulier que portent les désaccords entre l’Assemblée et le Sénat.
Notre haute assemblée a fait le choix de ne pas créer de délit spécifique, mais d’intégrer le harcèlement scolaire comme circonstance aggravante du harcèlement moral.
Nous avions soutenu en première lecture cette réécriture et nous n’avons pas changé de ligne.
Nous considérons le quantum de peines beaucoup trop élevé, pour des mineurs, surtout lorsque le harcèlement est un phénomène de groupe. Ces peines seraient de facto inapplicables.
Nous comprenons l’ambition de l’Assemblée nationale de vouloir, avec ce nouveau délit, permettre une meilleure caractérisation des spécificités de ces agressions par les forces de l’ordre et d’attirer encore davantage l’attention de la société, des élèves et de la communauté éducative sur le sujet.
Mais nous estimons que l’enjeu réside plutôt dans la formation de tous les acteurs concernés, dans l’identification, la détection et la prévention.
Je l’ai dit en première lecture et je le répète, l’état de délabrement de la médecine scolaire dans notre pays est un frein à ce processus.
Les médecins, infirmiers et infirmières scolaires pourraient être les vigies qui nous manquent tant.
Avec 900 médecins scolaires et 7 700 infirmiers et infirmières scolaires pour 12,5 millions d’élèves dans notre pays – soit un médecin pour 14 000 élèves et un infirmier ou infirmière pour 1 600 élèves : cette tâche est tout simplement impossible.
D’autres désaccords entre les deux chambres aussi ont vu le jour. Notamment sur la reconnaissance claire du cyberharcèlement – dont l’Assemblée nationale ne veut pas – ou encore les informations du tissu associatif, l’implication des CROUS ou les stages de responsabilisation à la vie scolaire – dont cette fois-ci le Sénat ne veut pas.
Mais c’est la suppression du délit de harcèlement qui a soulevé le plus d’incompréhension, surtout chez certaines associations de victimes.
Il aurait été plus sain et salutaire d’en débattre à nouveau lors de cette deuxième lecture mais notre rapporteur a déposé une question préalable sur ce texte, nous le déplorons.
Refuser le débat n’est jamais une solution, surtout sur des sujets aussi graves et sensibles.
Nous aurions souhaité discuter de ce texte, l’améliorer, confronter les visions des deux chambres pour lever toutes les ambiguïtés.
C’est pourquoi nous ne voterons pas cette motion.
Je vous remercie.