Madame, Monsieur la/le Président-e,
Madame Messieurs les Rapporteurs,
Messieurs les ministres démissionnaires,
Mes chers collègues,
Alors que dans le calendrier initial nous aurions déjà bouclé le projet de loi de finances 2025, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner un texte spécial mais vital en ces temps troublés : le projet de loi spéciale de finances, tel prévu par l’article 45 de la LOLF.
Ce texte n’a pas vocation à réorienter les grandes lignes de notre politique budgétaire, mais à garantir le fonctionnement de l’État dans une période d’incertitude. Il permet la collecte des impôts, le paiement des fonctionnaires, des retraites ainsi que la continuité des services publics sur la base des services votés dans la loi de finance de 2024.
Aujourd’hui, ce texte est indispensable, et c’est pourquoi, dans une logique de responsabilité, le groupe écologiste le votera.
Comment en sommes-nous arrivés là ? Cette loi spéciale, nécessaire par sa nature, n’en demeure pas moins le symptôme aigu d’une crise politique et budgétaire majeure.
Ne cherchons pas trop loin les responsables : la situation budgétaire catastrophique de la France en 2025 est la conséquence de 7 ans de VOTRE politique économique.
Elle s’est transformée en crise politique par la conséquence d’une méthode, ce cocktail du retour des LR au gouvernement combiné aux macronistes. Un cocktail amer pour les français, puisque Michel Barnier a fait le choix de placer la destinée du pays dans les mains de Marine Le Pen et ignorait le reste du Parlement. Ce qui a abouti à sa chute en trois mois.
La situation budgétaire catastrophique, oui c’est l’aboutissement de vos choix. Depuis 2017, le Président de la République et son infatigable ex-ministre de l’Economie, Bruno le Maire, ont appliqué sans relâche une politique de l’offre jusqu’à l’absurde, en multipliant les cadeaux fiscaux aux grandes entreprises et aux ménages les plus aisés, sans jamais en exiger des contreparties. Et ce, quelles que soient les crises que traversait le pays.
Le résultat de ces milliards pour quelques-uns et de cadeaux fiscaux financés par la dette ? 9 millions de pauvres, les plans sociaux se multiplient, nos collectivités se demandent comment boucler leurs budgets, un pays désarmé face aux catastrophes climatiques et le chaos envahit nos services publics sous-financés.
Cette crise budgétaire s’est transformée en crise politique. Résultat d’un aveuglement politique qui vire au déni. La destitution du Premier ministre Barnier est le dernier épisode, en date, de ce qui ressemble à une véritable débâcle institutionnelle, due à un entêtement à poursuivre une politique dont la légitimité n’a plus de base démocratique.
Et ne nous y trompons pas : les consultations que le Président de la République a mené ces derniers jours contribue à son propre affaiblissement tant elles se sont avérées inutiles. La preuve en est : après avoir reçu tous les représentants des partis qu’il jugeait dignes selon lui d’être qualifiés de “républicains”, multipliant les faux-semblant d’écoute et d’ouverture, il a au final nommé François Bayrou au poste de Premier ministre-maire. Un macroniste de la première heure, qui a dû s’imposer par la menace. Que de temps perdu. Mais nous le disons, les mêmes causes produiront les mêmes effets. Les mêmes ronds de jambe devant Marine Le Pen, et le même mépris pour la coalition de gauche arrivée en tête aux législatives, aboutiront à la même chute de Monsieur Bayrou.
Le chef de l’Etat et ses soutiens ne cessent de pointer du doigt la responsabilité des oppositions depuis la censure. Pourtant il semble ignorer que la censure n’est que l’expression institutionnelle d’un principe simple : le gouvernement est responsable devant le Parlement. C’est cette responsabilité qui a été ignorée, une amnésie certainement provoquée par l’abus de 49.3. Les responsables, les agents du chaos sont donc bien sur les bancs des ministres.
On peut rappeler que nous sommes arrivés ici à trouver des compromis sur le budget 2025, mais que 3 jours avant de chuter, le gouvernement, par son mépris habituel, a préféré imposer des secondes délibérations pour balayer nos travaux.
Alors osons un conseil : dans l’intérêt du pays, le mépris du travail parlementaire doit quitter Bercy, dans les valises des ministres démissionnaires.
Cette loi spéciale, si elle est nécessaire pour éviter le chaos, n’est qu’un palliatif. Le pays a besoin d’un véritable budget, à la hauteur des défis sociaux, environnementaux et économiques auxquels nous faisons face.
Nous, écologistes, appelons de nos vœux un budget fait de priorités claires : qui investit réellement dans la transition écologique, qui organise la solidarité et qui redonne des moyens à nos services publics, financé par la justice fiscale.
Mes chers collègues, de cela nous ne débattrons pas aujourd’hui, mais ce n’est pas pour autant que les sujets ont disparu. Il est urgent que le Gouvernement propose, sans délai, un projet de loi de finances. Nous sommes prêts à y travailler.
Nous voterons la loi spéciale qui nous est présentée aujourd’hui, dans l’intérêt général. Mais nous serons aussi intransigeants face à toute tentative de prolonger cette fuite en avant et cet attentisme qui affaiblit le pays, creuse les inégalités et réduit chaque jour un peu plus notre capacité budgétaire collective à faire face aux défis de notre époque.
Il n’y a plus de temps à perdre.
Je vous remercie.