Protéger l’Université des ingérences extra-européennes

Mes chers collègues,

La mission d’information sur les ingérences étatiques extra-européennes à l’Université a eu le mérite de découvrir un nouveau champ de réflexion pour l’action gouvernementale, à savoir : comment protéger notre Université de ces ingérences.

Les cas problématiques se multiplient, de la part de plusieurs états, mais c’est véritablement la Chine qui est leader en la matière, avec une véritable stratégie d’État, des relais, des moyens de contrôle, des personnels et des budgets plus que conséquent au service de cette ingérence.

Les mots ici ont un sens et celui d’ingérence tout particulièrement. Il s’agit – et notre rapporteur l’a clairement rappelé – d’une zone grise, entre l’influence, qui peut être parfaitement légitime, et l’intrusion, la captation, le vol ou la trahison, qui sont, elles, déjà sévèrement punies par notre droit national.

C’est de cet entre-deux que le danger semble provenir. Si action il y a de la part du gouvernement, celle-ci devra suivre une ligne de crête entre protection de notre souveraineté et préservation des libertés académiques.

En effet, ces libertés sont une des richesses multi-séculaires de notre pays. Nos universités ont tout loisir de mettre en place des partenariats, de dialoguer scientifiquement avec d’autres pays. Elles sont autant de ponts qui relient les cultures et elles sont des outils de notre influence nationale et d’enrichissement du patrimoine scientifique mondial. Cela doit être préservé.

Voilà pourquoi, Madame la ministre, il me semble important de ne pas surréagir et que le remède soit pire que le mal. Rien ne serait en effet plus dommageable pour le monde universitaire que son action à l’international soit mise sous tutelle de l’Etat. 

J’attire votre attention sur le point n°20 des propositions de notre rapport qui préconise un avis des ministères concernés sur les projets d’accord internationaux des universités. Un avis et pas une autorisation, j’insiste là-dessus. Il est impératif que cela reste un avis simple sous peine de rogner sérieusement sur des libertés fondamentales pour notre pays.

Dès lors, ma question est simple : quelles garanties pouvez-vous nous donner qu’une politique nécessaire du Gouvernement en la matière ne se traduise pas dans les faits par un renforcement du contrôle de l’Etat sur les Universités ? 

Les propos de votre collègue Sarah El Haïry en début d’après-midi concernant le prétendu “wokisme” ne m’ont pas rassuré quant à la volonté de l’Etat de rester neutre entre une recherche autorisée et une autre jugée déviante. 

Je vous remercie.

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