Madame/Monsieur la/le Président-e,
Madame la Ministre,
Mes chers collègues,
La France a été sommée de transcrire en droit interne le dernier code mondial antidopage et ce, avant le 12 avril.
En cas de non-conformité, notre pays s’exposera à des sanctions, avec notamment des interdictions de participation de ses athlètes aux compétitions sportives internationales ou d’organisation d’épreuves sur son sol.
Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui habilite donc le gouvernement à légiférer par ordonnance afin de répondre à l’urgence de la mise en conformité de notre droit national avec le nouveau code mondial antidopage.
Pourquoi une telle urgence à agir maintenant, alors que le processus de révision du code mondial antidopage a été initié en 2017 ?
La raison tient à notre calendrier parlementaire, fortement impacté par la crise sanitaire.
Sur cette affaire, le Gouvernement ne peut en être tenu responsable puisque son projet d’ordonnance a été déposé bien en amont, le 19 février 2020.
Il nous faut donc légiférer maintenant, dans l’urgence certes, mais aussi avec responsabilité.
Sur le contenu de ce code antidopage, force est de constater qu’il ne s’agit pas d’une révolution, mais de quelques améliorations assez techniques et bienvenues pour renforcer l’efficacité de la lutte contre le dopage.
Protection des personnes dénonçant des actes de dopage – une protection bienvenue pour les lanceurs d’alerte
création d’une nouvelle catégorie de substances englobant les stupéfiants utilisés dans un contexte sportif,
assouplissement des sanctions pour les sportifs de loisirs : ces réformes sont plutôt consensuelles et sont saluées par l’ensemble des acteurs.
Toutefois, deux points en particulier ont retenu l’attention du Sénat en commission et l’ont empêché de voter le texte en l’état.
Tout d’abord, concernant les pouvoirs confiés à l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD). Nous souhaitons que celle-ci soit dotée de pouvoirs supplémentaires, notamment de convocation, d’audition et de capacité à utiliser une fausse identité sur internet.
Ces pouvoirs d’enquête administratifs sont d’ailleurs prévus par le nouveau code mondial antidopage.
Ensuite, concernant le nouveau laboratoire anti-dopage – qui doit désormais être indépendant pour des raisons de lutte contre les conflits d’intérêt – des interrogations subsistent quant à son modèle économique et les moyens nécessaires à son fonctionnement au sein de son organisme d’accueil, l’Université de Paris-Saclay.
C’est pourquoi, avec ma collègue Monique de Marco, nous avons décidé de cosigner les trois amendements déposés par nos collègues Kern, Lozach et Savin.
Non pas, Madame la ministre, pour mettre en danger le processus législatif du texte et prendre le risque d’une seconde lecture en cas de vote non-conforme au Sénat, mais simplement pour que vous puissiez, devant la représentation nationale et le public qui nous regarde, lever tous les doutes sur l’ordonnance que nous examinons aujourd’hui.
Je sais que vous avez mené un important travail de concertation avec l’AFLD, avec Paris-Saclay et avec nos rapporteurs, mais le débat d’aujourd’hui est aussi l’occasion d’en faire part publiquement.
Ceci étant dit, ce projet de loi est aussi l’occasion d’aborder un sujet central, celui de la prévention.
Madame la Ministre, je crois comprendre que votre projet d’ordonnance prévoit simplement de confier aux fédérations sportives la tâche d’organiser des actions de prévention et d’éducation en lien avec votre ministère.
L’intention est louable, mais elle reste encore déclarative. Le même reproche peut d’ailleurs être adressé au code mondial antidopage lui-même qui fait de l’éducation et de la prévention des valeurs centrales sans pour autant expliquer comment celles-ci se mettent en œuvre.
On ne peut s’empêcher de voir dans la lutte contre le dopage les mêmes errements que nos sociétés rencontrent avec la lutte contre les stupéfiants.
Car les deux catégories de produits sont similaires, avec parfois les mêmes risques, les mêmes addictions, les mêmes dégâts pour la santé et l’intégrité physique.
Ces questions ne seront pas simplement résolues en les limitant à la compétition du sport de haut niveau.
Le dopage n’est pas un acte accompli seulement par des athlètes soucieux de s’assurer les meilleurs classements.
C’est une pratique présente partout dans le sport, depuis les amateurs qui se procurent des produits douteux sur internet jusqu’aux sportifs de haut niveau aidés par des équipes médicales peu scrupuleuses.
Tous les sports, tous les milieux sont concernés.
Ainsi, comme souvent, le tout-répressif montre ses limites.
Il nous faut de l’éducation, de la prévention, mais aussi de l’accompagnement sanitaire, et des politiques de sortie de l’addiction.
Hormis ce nécessaire débat dont notre société ne pourra se soustraire encore trop longtemps, les sénatrices et sénateurs du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires reconnaissent les avancées contenues dans l’évolution du code mondial antidopage et souhaitent leur transcription dans le droit national.
C’est pourquoi nous voterons pour ce projet de loi.
Je vous remercie.